Le territoire reçoit ses premiers défricheurs dans la première moitié du XIXe siècle. En 1848, la paroisse de Saint-Urbain-Premier fait l'objet d'une érection canonique, par suite de sa séparation de Sainte-Martine, plus au nord-ouest. Sur le plan municipal, la municipalité de la paroisse de Saint-Urbain-Premier est établie en 1855 et doit son nom à saint Urbain Ier, dix-septième pape de 222 à 230, fils d'un noble romain, Pontien. Sainte Martine, qui identifie la paroisse mère, a subi le martyre au IIIe siècle, alors qu'Urbain Ier, lui-même martyrisé, régnait. Le bureau de poste local, après avoir été identifié sous la dénomination de Saint-Urbain de 1853 à 1876, a reçu celle de Saint-Urbain-de-Châteauguay, d'après le comté auquel l'endroit était jadis rattaché, afin de le différencier de celui de Saint-Urbain en Charlevoix.
En avril 1992, les autorités municipales adoptaient le gentilé Saint-Urbanais qui cristallise désormais le sentiment d'appartenance des citoyens à l'endroit. Le 12 avril 1997 le statut juridique de la municipalité de paroisse était changé pour celui de municipalité. La diversité des commerces d’antan et la présence de professions libérales expliquent en partie comment ces modestes communautés parvenaient à un degré étonnant d’autonomie. Le parcours suggéré vous expliquera les détails du patrimoine bâti de ce village et certains moments forts de sa trame historique. Bienvenue aux amateurs d’histoire locale et aux fervents de grands espaces champêtres.
L'église...
... point d’ancrage de la communauté saint-urbanaise depuis le milieu du XIXe siècle. Détachée du territoire de Sainte-Martine en 1848, la nouvelle paroisse fait appel à ses cotisants catholiques et s’offre un bâtiment d’église de bonnes dimensions accompagné d’un presbytère situé à sa droite. La construction s’étale sur plus de deux ans. La première messe chantée et l’ouverture des registres datent de novembre 1852. Une vingtaine d’habitations et de petits commerces forment alors le noyau villageois le long du chemin Guillaume qui relie Sainte-Martine au «scotch settlement». En 1902, on ajoutera en façade la tour d’un clocher principal flanquée de deux clochetons latéraux. Un système automatisé permet depuis quelques années aux cloches de se faire entendre midi et soir. À Saint-Urbain-Premier, le tintement des cloches est encore et toujours un signe de rassemblement pour la communauté et un symbole de continuité avec le passé.
Le cimetière
L’histoire de Saint-Urbain-Premier commence bien avant l’érection de son église. Dès 1812, un groupe de colons écossais avait repéré un territoire inoccupé de Williamstown, secteur de la seigneurie de Beauharnois aux limites sud-est de la municipalité actuelle. L’arpentage officiel des lots par les autorités seigneuriales et la division en cinq concessions du futur Saint-Urbain-Premier datent de 1821. Vers 1835, tous les lots avaient déjà été concédés tant la demande pour ces excellentes terres était grande. En plus d’une forte minorité écossaise regroupée autour de son temple presbytérien du Beechridge, la population francophone est venue des paroisses limitrophes. Les inscriptions sur les pierres tombales (Demers, Jodoin, Lemieux, Marcil, Vincent, Sainte-Marie, etc.) indiquent que les patronymes d’ici viennent en grande partie de vieux terroirs alors surpeuplés comme Laprairie, Longueuil et Chambly. L’allée centrale et son calvaire, le charnier en pierre, le mur des Anonymes (section des ondoyés) et les plus vieilles stèles funéraires évoquent le passé de ce lieu de recueillement.
La caserne de pompiers et
autres services publics d’antan
Suite à l’incendie majeur de 1924 qui détruisit une portion du village et qui fut combattu avec des « chaudières » relayées de main à main, les autorités de l’époque achetèrent une première pompe. Le bureau de poste moderne rend un service qui n’était pas encore disponible aux quelque deux mille habitants au recensement de 1851. On le met en place en 1854. La caisse populaire est fondée en juin 1939. Quelques succursales bancaires du temps l’avaient précédée. Les poteaux de télégraphie puis de téléphone rejoignent le village vers 1910. Le barrage de l’entrepreneur Dunn à Sainte-Martine fournit l’éclairage électrique vers 1925. Le premier terrain de balle éclairé de la région sera construit derrière le cimetière en 1959. Avant que la poste et la caisse ne s’y installent, ce vaste espace permettait diverses manifestations publiques (patinoire, expositions, etc.). On y voit aussi l’ancienne salle paroissiale construite en 1902 par la fabrique. On y allait pour « marcher au catéchisme », visionner les films de Charlie Chaplin ou écouter son candidat favori lors des élections.
L'école primaire
En 1959, on inaugure l’École centrale, comme on la qualifia alors. Elle remplace ainsi l’école du village et les six écoles de campagne présentes alors dans le haut et le bas de chaque rang. Quelques écoles protestantes ont parsemé le territoire jusqu’en 1937. Ainsi centralisée, la population scolaire catholique est transportée depuis cette époque par les autobus jaunes et remplissait au début huit locaux de la première à la huitième année. En 1989, on construit, à la droite de l’école, une grande salle multifonctionnelle qui servira de gymnase pour les élèves et de salle de réception pour la communauté. Au cours des années 1970 et 1980, la grande cour permit l’installation de vastes chapiteaux pour la tenue des festivals westerns et des Moissons qui donnèrent à la municipalité une renommée régionale. En août 2002, on monta dans cette même cour un plus vaste chapiteau pour célébrer pendant une semaine durant le 150e anniversaire de fondation de la paroisse.
Le parc de la Butte
Aux limites du village, ce petit parc ombragé où la MRC a installé des panneaux d'interprétation, permet un point de vue sur de vastes espaces agricoles. Le parvis de l’église, c’est entendre les conversations d’après la grand-messe du dimanche. Un cimetière, c’est ressasser des souvenirs parfois douloureux. Une patinoire de village, c’est l’occasion inespérée d’impressionner sa (future) blonde. Une cour d’école, ce sont autant de cris, d’exclamations et de cloches. Tantôt, on vous amène à la forge, on y entendra les martèlements répétitifs du marteau sur l’enclume. Puis au magasin général, il y aura l’odeur des cuirs. Et sur le site du grand incendie de 1924, la fumée, la panique, la résignation…
Le centre municipal (no 204)
Il s'agit de l'édifice ayant abrité la dernière école du village. Sa construction en 1932 exigea le spectaculaire déplacement de trois bâtiments. Mises sur des roues ou simplement glissées sur de gros troncs, les constructions pouvaient ainsi être déménagées. La maison Faucher se retrouve aujourd’hui au milieu du rang Double (no.65), la vieille école jugée trop exigüe est juste en bas du village (no.180). Quant à la maison de l’ancien forgeron Vincent, elle est située à l’autre extrémité du village (rue Principale no.228). Cette ancienne école est un heureux exemple de préservation du patrimoine bâti. La municipalité décida d’en faire son centre municipal en 1981. Deux maisons voisines, l’une en pièces sur pièces( no.202), l’autre en brique peinte, qui fut celle des cordonniers Marcil pendant plus de 60 ans (no.201), illustrent le caractère typique de la jolie petite maison villageoise d’époque. En face, un commerce (no.205) a remplacé depuis longtemps la forge Vincent reprise par Théodule Lemieux . En biais, l’ancienne salle paroissiale (no.207) a perdu quelques-uns de ses attraits originaux. Par contre, la maison Ste-Marie ( no 206.) sait mettre en valeur les parements de sa galerie et sa corniche joliment peinte.
La maison du docteur Trépanier (no 214)
Une véranda en bois, quelques ornementations au toit de la galerie, des ouvertures encadrées, un parement extérieur en déclin étroit, une palette de couleurs harmonieuses, voilà bien la recette suivie par les propriétaires actuels de cette habitation pour mettre en valeur l’architecture traditionnelle de nos maisons d’époque. Face à l’église, nous sommes au cœur du village d’antan. Tout à côté, un espace est laissé vacant . C`était le site occupé par le magasin Barrette, magasin général où on trouvait les cuirs, les tissus, les journaux, etc. Un vieux livre de comptes du magasin des années 1875 révèle qu’on pouvait entre autres y louer les services d’un étalon pour sa jument ou acheter des planches et des clous ornementés pour un cercueil. La photo révèle qu’on y vendit l’essence aux premières autos. L’auto et des routes mieux entretenues réduiront petit à petit la fonction commerciale du village. Les notables, notaire et médecin de petit village, aussi attirés par de plus grands centres, auront disparu avant 1950.
La maison Jos Rose (no 224)
Jos Rose fut un des fondateurs de la Caisse populaire et sa maison y accueillit ses premiers épargnants. En septembre 1924, plusieurs ouvriers étaient présents au village pour macadamiser le chemin principal jusque là fait de terre battue. Quelques-uns de ces hommes furent hébergés pour la nuit dans les granges derrière cette élégante maison de briques. Une cigarette mal éteinte serait ainsi à l’origine du pire incendie de l’histoire du village. Tous les commerces et maisons situés de part et d’autre du chemin à l’est de la rue d’en face furent réduits en cendres. Les magasins Primeau et Sabourin, l’hôtel Dubuc, la ferme Jodoin et six autres maisons disparurent en quelques heures. On mit une dizaine d’années à reconstruire ce secteur du village. La plupart des bâtiments reconstruits furent alors parés de briques. Une odeur âcre de fumée persista longtemps. En face, la maison du notaire Poupart échappa miraculeusement au désastre. Heureusement, car les effluves du four à pain de son arrière-boutique, tenue plus tard par le boulanger Albert Beaulieu, contribuèrent sans doute à alléger l’atmosphère de cette douloureuse période.